Discriminations à l’embauche : les résultats du dernier testing de SOS racisme

SOS racisme a dévoilé ce mardi 12 mars les résultats d’un nouveau testing mené auprès des agences d’intérim. La méthode de testing consiste à appeler les sociétés spécialisées dans le travail temporaire en se faisant passer pour l’employé d’une entreprise fictive à la recherche de travailleurs intérimaires dans les secteurs du bâtiment et de l’hôtellerie. Cette opération a été menée auprès de 152 agences appartenant aux dix principales enseignes françaises, entre octobre et décembre 2023.

Un comportement ambigu dans 61 % des cas

Dans 61 % des cas, les agences adoptent un comportement problématique face à des demandes de discriminations basées sur l’origine. Les agences, par exemple, proposent au client de trier lui-même les CV afin de faire sa propre sélection. Dans 14 % des cas, la discrimination ne fait aucun doute : l’agence accepte de faire une présélection des CV selon l’origine des candidats.

Une légère diminution des pratiques ouvertement racistes par rapport à 2021

Plus d’un tiers des agences testées ont cependant refusé de faire une présélection sur la base de l’origine raciale des candidats, ce qui est en progression depuis le dernier testing réalisé par SOS racisme, en 2021. Les agences sont plus prudentes, elles refusent d’opérer elles-mêmes une discrimination mais conseillent à leur client de trier lui même les CV, ce qui est une forme de complaisance vis-à-vis des pratiques discriminatoires.

Pour Dominique Sopo, président de SOS Racisme, trop d’acteurs du secteur font encore preuve de « complicité », voire de « complaisance » en disant au client de faire la sélection lui-même. Il y voit « une défaillance de ces professionnels de l’emploi qui devraient systématiquement rappeler la loi ».

L’IA aussi adopte des comportements racistes dans le recrutement 

Selon une expérinence menée par l’entreprise Bloomberg,  les programmes de recrutement automatisés GPT-3 et GPT-4 de l’OpenAI pourraient aussi être gravement discriminatoires à l’égard de certains groupes de personnes. Ainsi, l’étude approfondie a utilisé des noms fictifs (et des CV) associés à une ethnie particulière pour postuler à un emploi réel. 

Les noms choisis étaient ceux de femmes et d’hommes noirs, blancs, hispaniques ou asiatiques. L’expérience a été menée 1 000 fois pour un emploi réel d’analyste financier avec des centaines de noms et de combinaisons de noms différents, puis elle a été répétée pour quatre autres emplois d’ingénieurs logiciels et d’autres groupes professionnels et d’autres groupes professionnels. 

Il ressort de l’étude que les noms de certains groupes démographiques ont été clairement favorisés par le GPT-3. Par exemple, les noms de femmes américaines d’origine asiatique ont été les mieux classés pour un poste d’analyste financier, tandis que les noms indiquant clairement des hommes noirs ont été les moins bien classés, mais les noms indiquant des femmes noires n’ont également été classés comme meilleurs candidats pour un poste d’ingénieur logiciel qu’environ 11 % du temps – soit environ 36 % de moins que le groupe ayant obtenu les meilleurs résultats.

Une proposition de loi pour généraliser le testing 

Face à ces dérives, le gouvernement travaille sur une proposition de loi visant à généraliser le testing en France pour mesurer la discrimination à l’embauche. Deux types de tests sont visés par la proposition de loi :

  • Le test statistique consiste à soumettre à des employeurs un nombre important de candidatures similaires avec comme seule différence un critère de discrimination. Ce type de test ne peut être mobilisé à titre de preuve dans un contentieux discriminatoire parce qu’il repose sur des candidatures fictives. En revanche, les noms des employeurs dont la pratique discriminatoire a été révélée peuvent être publiés après consultation et avis du défenseur des Droits.
  • Le test individuel permet, quant à lui, de « mettre en évidence une discrimination subie par une personne réelle, en adressant une candidature similaire à la sienne, mais dépourvue du critère de discrimination ». Déjà admis par le Code pénal, il peut être mobilisé dans le contentieux et ouvrir droit à la réparation d’un préjudice résultant d’une discrimination. 

A retenir 

La dernière enquête menée par SOS Racisme révèle une persistance des pratiques discriminatoires dans le recrutement au sein des agences d’intérim en France, malgré une légère amélioration par rapport aux années précédentes. L’étude souligne une forme de complicité dans la discrimination raciale à l’embauche. Cependant, un tiers des agences ont refusé de se prêter à une telle sélection, marquant un progrès par rapport au dernier test de SOS Racisme en 2021.

Notre article met aussi en lumière les problèmes de discrimination potentielle liés à l’utilisation de l’intelligence artificielle dans le recrutement, en particulier avec les systèmes automatisés comme GPT-3 et GPT-4 d’OpenAI. Une étude citée indique que ces systèmes peuvent favoriser certains groupes démographiques au détriment d’autres, basés sur l’ethnicité perçue à travers les noms sur les CV, ce qui pose des questions importantes sur l’équité et la neutralité des processus de recrutement automatisés.

Face à ces constats, une proposition de loi est en cours d’élaboration pour généraliser le testing comme moyen de lutte contre la discrimination à l’embauche en France..

Ces résultats et les mesures proposées mettent en évidence la nécessité continue de combattre la discrimination à l’embauche et d’améliorer les pratiques de recrutement pour assurer l’équité et l’inclusion dans le monde du travail.

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