Pénurie d’essence : tous dépendants de la voiture pour travailler ?

La menace de pénurie d’essence est toujours au plus haut en ce début de semaine et Elisabeth Borne a convoqué plusieurs ministres, lundi 10 octobre au soir, pour trouver des solutions de sortie à la crise qui touche les raffineries. Elle vient d’annoncer la réquisition des personnels indispensables au fonctionnement des dépôts.  Face au risque de panne sèche, les automobilistes sont de plus en plus nombreux à ne plus pouvoir aller travailler. Qu’en est-il vraiment ? À quel point les salariés français sont-ils dépendants de la voiture pour travailler ?

La voiture dans les déplacements professionnels du quotidien : où en est-on ?

S’il est une vertu des situations de manque, c’est qu’elles nous permettent de pointer du doigt notre propre dépendance, mais aussi d’interroger  la réalité de nos pratiques…. Et de nos marges de manœuvre. Décryptage.

74% des salariés utilisent leur voiture pour travailler

Selon une étude de l’INSEE sur la mobilité quotidienne, 74 % des salariés français utilisent leur voiture pour aller travailler. Et c’est encore plus le cas pour les actifs situés en dehors des grandes aires urbaines. 90 % des non citadins utilisent la voiture pour rejoindre leur poste de travail.

Cette réalité est encore plus criante dans les zones d’activités qui concentrent les entreprises industrielles, commerciales et certains bureaux. Souvent excentrées, elles restent encore mal desservies par les transports en commun. Conséquence ; aller travailler dans une zone d’activité implique d’utiliser sa voiture individuelle dans 90 % des cas.

Dans les communes rurales 66% des habitants juge encore insuffisante l’offre en transports et seuls 17% disent pouvoir choisir entre plusieurs modes de mobilité selon l’Ademe.

38 % des automobilistes aimeraient passer moins de temps en voiture

En parallèle, plus d’un tiers des salariés aimeraient

 réduire le temps consacré à la mobilité au quotidien, et passer moins de temps en voiture.  Après les confinements liés à la crise COVID-19, et face à l’essor du télétravail, de nombreux actifs remettent en question leur mode de déplacement.  La transition vers la démobilité, implique selon certains, non pas de ne plus bouger de chez soi, mais de passer d’une mobilité subie à une mobilité choisie, souvent plus frugale et raisonnée. Selon Julien Damon, auteur de « La démobilité : travailler, vivre autrement », l’enjeu est d’abord de réduire les déplacements pénibles. À l’heure où les salariés sont de plus en plus en plus attentifs à leur qualité de vie au travail et à l’équilibre vie professionnelle/ vie privée, il y a un attrait réel des modes de travail alternatifs permettant de réduire, voire supprimer les trajets pendulaires. La balle est donc dans le camp des entreprises pour repenser leurs organisations du travail vers plus de télétravail, mais aussi en recourant aux tiers-lieux, ou en appliquant le flex-office.

Seulement 1 actif sur 3 peut exercer son métier en télétravail

Travailler sans bouger de chez soi est sans doute une belle opportunité pour réduire les émissions de CO2 ou simplement faire face aux pénuries de carburant.  Mais elle ne concerne pas tous les salariés. Les ouvriers, les employés des services et des commerces, les salariés du secteur santé , sont souvent exclus des solutions de travail hybrides. Les salariés prioritaires à la pompe à essence sont souvent les mêmes que les travailleurs des premières lignes du confinement. Leur présence sur les postes de travail est essentielle au fonctionnement de notre société.

Mobilité douce : les salariés (et les entreprises) peuvent mieux faire

Comment aller travailler en pleine pénurie d’essence ? Les solutions de mobilité douce restent encore souvent négligées ou marginales.

Faut-il de l’essence pour parcourir le dernier kilomètre ?

Est-ce lié au manque de solutions ou aux mauvaises habitudes ?  On est en droit de se demander. Selon la dernière enquête de l’INSEE, 42 % des personnes dont le lieu de travail est situé à moins d’un kilomètre continuent d’utiliser l’automobile comme mode de déplacement quotidien. Il y a donc de grandes marges de manœuvre en termes de mobilité alternative. 

Pour autant les usages alternatifs continuent, doucement, de se développer. Dans les métropoles et grandes villes, les trottinettes et vélos, les solutions de glisse, trouvent peu à peu leur place dans le paysage urbain. Elles permettent souvent de franchir ce fameux “dernier kilomètre” sans dépenser trop de CO2.

Un changement de perception balbutiant

 La mobilité partagée est une solution particulièrement plébiscitée grâce aux applications numériques faciles d’accès.

L’observatoire des mobilités émergentes note d’ailleurs une inflexion de l’utilisation de la voiture pour les trajets journaliers. 10% des automobilistes se disent ouverts à un usage serviciel (autopartage, location ponctuelle) et 7% seraient prêts à se passer de voiture s’ils disposent d’une alternative viable.  Un chiffre encourageant, mais qui reste modeste….

La sobriété énergétique en horizon commun

La démobilité semble encore un concept quand on regarde l’état des pratiques. Ce qui n’est pas théorique en revanche, c’est l’impératif de sobriété énergétique. Et si la pénurie de carburant n’était qu’une répétition générale ? En tous les cas, le plan de sobriété énergétique affiche clairement la mobilité comme un levier clé des économies d’énergie. Le secteur des transports représente 32 % de nos consommations finales d’énergie et 30 % des émissions de gaz à effet de serre en France..

Plusieurs mesures sont donc prévues, comme l’aide renforcée au covoiturage ou la prise en charge par les employeurs des frais liés aux services de location de vélos électriques. Cette optimisation de l’offre existante devra coexister avec une plus grande sobriété, notamment en termes de réduction des déplacements inutiles au profit des visioconférences par exemple. Un nouveau défi à relever en 2023 pour les RH.

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